Mandat de vendre et mandat de donner congé (samedi, 23 juin 2007)

Ce n’est pas parce que l’agence immobilière a reçu du propriétaire mandat de mettre en vente un immeuble qu’elle reçoit par là-même mandat de donner congé au locataire qui occupe l’immeuble, selon cette décision rendue par la Cour de Cassation le 12 juillet 2006 :

 

« Attendu que, par acte sous seing privé du 8 mars 2002, Mme X... a donné à la société Centre immobilier Toulousain (la société CIT), agent immobilier, mandat "de mettre en vente et de vendre" un immeuble lui appartenant, donné en location à M. Y... ; que faisant valoir que congé lui avait été donné au nom de Mme X... par la société CIT, laquelle lui avait notifié une offre de vente de cet immeuble qu'il avait acceptée, M. Y..., en raison du refus de Mme X... de souscrire l'acte authentique constatant ladite vente, l'a assignée en réalisation de celle-ci ; que reprochant à la société CIT d'avoir excédé les limites du mandat qu'elle lui avait donné, Mme X... l'a assignée en réparation du préjudice né de cette faute ; que jonction de ces instances a été ordonnée ;

 

Sur le deuxième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces griefs dont aucun ne serait de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :

Vu les articles 1 et 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et l'article 72 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;

Attendu que, selon les dispositions des deux premiers de ces textes qui sont d'ordre public, les conventions conclues avec les personnes physiques ou morales qui, d'une manière habituelle, se livrent ou prêtent leur concours aux opérations portant sur les biens d'autrui et relatives, notamment, à la vente d'immeubles, doivent être rédigées par écrit ; qu'aux termes du troisième, le titulaire de la carte professionnelle "transactions sur immeubles et fonds de commerce" doit détenir un mandat écrit qui précise son objet et qui, lorsqu'il comporte l'autorisation de s'engager pour une opération déterminée, fait expressément mention de celle-ci ;

Attendu que pour décider que la société CIT avait reçu de Mme X... mandat de donner à M. Y... congé aux fins de vente de l'immeuble que celui-ci occupait en qualité de locataire et en déduire qu'en raison de l'acceptation par M. Y... de l'offre de vente attachée à ce congé, la vente dudit immeuble était parfaite, la cour d'appel retient que si le mandat de vendre donné par Mme X... à la société CIT ne précisait pas la nature de la vente envisagée, il résultait de la commune intention des parties que celui-ci était un mandat de vendre un bien libre de toute occupation, comportant l'obligation légale de donner congé au locataire ;

Qu'en se déterminant ainsi alors que selon ses propres constatations le mandat litigieux ne contenait aucune mention emportant autorisation pour la société CIT de délivrer un tel congé, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les textes susvisés ;

 

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article 625, alinéa 2, du nouveau code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande formée par Mme X... contre la société CIT, l'arrêt attaqué énonce que la motivation relative à l'étendue du mandat donnée à celle-ci est exclusive de la faute qui lui est imputée ;

Que la censure de ladite motivation prive de fondement cette décision et entraîne, par voie de conséquence, la cassation de celle-ci ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux dernières branches du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, en ses dispositions autres que celles déclarant nulle l'assignation du 17 mars 2003 et disant n'y avoir lieu à appel en cause des consorts Z..., de Mme Françoise A... et de Mme Catherine A..., l'arrêt rendu le 6 septembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;

Condamne la société CIT aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ».