Retrait du permis de construire et annulation de la vente (mardi, 19 juin 2007)

Cette décision rendue le 23 mai 2007 par la Cour de Cassation casse un arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence qui avait jugé que le retrait du permis de construire, après la vente, avait pour effet d’entraîner l’annulation de la vente d’un terrain.

 

Les conseillers de la cour d’appel avaient jugé que l’effet rétroactif du retrait devait conduire à considérer que le permis de construire n’avait jamais été accordé, alors que la Cour de Cassation considère que cette rétroactivité est sans effet sur l’erreur, qui s’apprécie au moment de la conclusion du contrat.

 

En fait, les acquéreurs auraient dû prévoir une condition suspensive tenant au caractère définitif du permis de construire.

 

«Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 octobre 2005), que, selon acte sous seing privé en date du 9 novembre 1998, la SNC Passariello (la SNC) a vendu aux époux Z... une parcelle de terrain à bâtir, située en bordure d'un cours d'eau, sous la condition suspensive de l'obtention d'un permis de construire ; que celui-ci ayant été délivré le 16 décembre 1998, les parties ont réitéré la vente par acte authentique reçu le 29 décembre suivant par M. Y..., en concours avec M. X..., notaires ; qu'à la suite d'une crue du cours d'eau survenue les 18 et 19 janvier 1999, le maire a, le 4 février 1999, rapporté l'arrêté municipal du 16 décembre 1998 et refusé le permis de construire ; que les époux Z... ont assigné la SNC en annulation de la vente pour erreur sur la substance et MM. Y... et X... en responsabilité ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Vu l'article 1110 du code civil ;

Attendu que pour accueillir la demande en annulation de la vente, l'arrêt, qui relève que le retrait fait disparaître rétroactivement la décision qui en fait l'objet laquelle, de ce fait, est réputée n'avoir jamais existé, retient qu'il est établi que le caractère constructible du terrain en cause était un motif déterminant du consentement donné par les époux Z..., dans la mesure où ceux-ci avaient fait insérer dans l'acte sous seing privé en date du 9 novembre 1998 une condition suspensive relative à l'obtention d'un permis de construire, et que l'arrêté municipal du 4 février 1999 rapportant le permis de construire précédemment accordé et refusant tout permis consacre le caractère inconstructible du terrain en cause ;

 

Qu'en statuant ainsi, alors que la rétroactivité est sans incidence sur l'erreur, qui s'apprécie au moment de la conclusion du contrat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que pour débouter les époux Z..., l'arrêt retient qu'ils n'ignoraient pas que le terrain dont ils faisaient l'acquisition était situé dans une zone inondable, que M. X... et M. Y..., notaires, ont pris la précaution de leur faire signer la fiche intitulée "renseignements d'urbanisme", qui a été annexée à l'acte authentique en date du 29 décembre 1998 et dans laquelle il a été expressément indiqué "inondable de 0 à 1 mètre - limite crue centennale", que dans cet acte, après le rappel du contenu de la note, il est précisé "de laquelle note d'urbanisme, l'acquéreur reconnaît avoir pris connaissance et s'engage à faire son affaire personnelle des indications et prescriptions qu'elle contient" et qu'il apparaît, dès lors, qu'il ne peut être reproché aux notaires intervenants à l'acte d'avoir manqué à leur devoir de conseil en l'état des informations dont ils avaient alors connaissance, étant précisé que les époux Z... qui achetaient ce terrain dans le cadre de la loi Périssol ne contestent pas qu'ils devaient signer cet acte avant le 31 décembre 1998 pour pouvoir mener à bien cette opération sur le plan fiscal ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les notaires n'avaient pas manqué à leur devoir de conseil en omettant d'éclairer leurs clients sur les risques qu'ils encouraient en s'engageant avant que le permis de construire n'ait acquis un caractère définitif, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 octobre 2005, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ».